GUY MARIUS SAGNA – MOUSTAPHA GUIRASSY : DUEL SUR TAPIS ROUGE À L’ ASSEMBLÉE NATIONALE
avril 26, 2025
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L’échange épistolaire entre le député Guy Marius Sagna et le ministre de l’Éducation nationale Moustapha Guirassy aurait pu relever du débat républicain. Mais il a vite glissé vers
L’échange épistolaire entre le député Guy Marius Sagna et le ministre de l’Éducation nationale Moustapha Guirassy aurait pu relever du débat républicain. Mais il a vite glissé vers une discussion surréaliste sur les vertus pédagogiques d’un tapis, l’importance républicaine d’un pot de fleurs et l’urgence stratégique d’une bouilloire. Un directeur général s’en est même mêlé, par ironie ou loyauté mal placée, transformant une simple interpellation parlementaire en foire aux bons mots .
En matière d’éducation, on aurait pu espérer que les préoccupations tournent autour de l’avenir des élèves, de l’état des infrastructures scolaires ou encore de la formation des enseignants.
Mais non, l’affaire du mois concerne un tapis, des tableaux, un matériel de petit-déjeuner, et même, tenez-vous bien… de jolis pots de fleurs. Le tout pour la modique somme de 650 000 F CFA.
Qu’on se rassure : ce n’était ni pour une école, ni pour une crèche, mais pour égayer le bureau du ministre de l’Éducation nationale, Moustapha Guirassy.
Tout a commencé par une question écrite du député Guy Marius Sagna. L’élu du peuple, fidèle à son style combatif, s’est interrogé sur ces dépenses dites de « fonctionnement », engagées par le ministère.
« Changer du neuf par du neuf », s’indigne-t-il, en interpellant un ministre qui, selon lui, gère les deniers publics avec un goût quelque peu dispendieux pour l’esthétique.
La réplique de Moustapha Guirassy fut aussi longue qu’un discours de rentrée. Défendant avec ardeur ses tapis et sa cafetière, le ministre a rappelé que ces acquisitions étaient tout à fait normales, réglementées, budgétisées – presque sacrées, aurait-on dit.
Car après tout, comment accueillir dignement un partenaire technique sans un bon salon moelleux et un bouquet d’hortensias bien placé ? À croire que la diplomatie éducative commence par la déco.
Mais c’est peut-être le passage sur la « concurrence libre et non faussée » dans l’achat du tapis qui a le plus émerveillé les observateurs.
Le ministre n’a pas hésité à convoquer l’Europe, l’Amérique et probablement l’Olympe pour justifier la présence d’un coin petit-déj dans son ministère.
Le Sénégal, pays pauvre certes, mais riche en inspiration décorative. Comme souvent dans les tragédies grecques, un chœur s’est invité. En l’occurrence, un directeur général nommé Waly Diouf Bodian, qui a trouvé bon de railler les deux protagonistes. Une intervention qui n’aidait ni la cause du ministre, ni celle du député, mais qui ajoutait une touche de satire à une pièce déjà bien farcesque.
Le député Guy Marius Sagna, lui, est revenu à la charge. La liste de ses 29 interpellations restées sans réponse est un inventaire à la Prévert des urgences scolaires : lycée fermé ici, dalle effondrée là, absence de manuels ailleurs.
Face à cela, le ministre Moustapha Guirassy, manifestement plus préoccupé par les nuances chromatiques de son salon, n’a pas eu un mot.
Le clou de l’échange ? Guirassy accuse son interlocuteur de « désolant spectacle » et l’invite à s’intéresser au plan Diomaye pour la Casamance.
Pendant ce temps, les écoles manquent de tout, sauf peut-être de tapis… au ministère. Il faudra bien un jour que les Sénégalais tranchent : préfèrent-ils des pots de fleurs bien alignés au ministère ou des écoles dignement équipées pour leurs enfants ? En attendant, à défaut de réponses sur l’éducation, on peut au moins se consoler avec un bon café… s’il reste du budget.