23 December 2024
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DÉCRYPTAGE : Comment le Xessal a fait son retour sur nos écrans

  • septembre 23, 2024
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Elles sont toutes mortes. En quatre mois, toutes les patientes souffrant de cancer de la peau causé par la dépigmentation (Xessal) de l’Institut Polyclinique sont décédées. Elles étaient

DÉCRYPTAGE : Comment le Xessal a fait son retour sur nos écrans

Elles sont toutes mortes. En quatre mois, toutes les patientes souffrant de cancer de la peau causé par la dépigmentation (Xessal) de l’Institut Polyclinique sont décédées. Elles étaient une dizaine traitée entre décembre 2023 et mars 2024, selon les données fournies par l’Association internationale d’information sur la dépigmentation artificielle (Aiida). Pourtant, près de 50% des femmes de certaines villes (Kaffrine, Parcelles-assainies, Pikine, Guédiawaye) s’adonnent à la dépigmentation de la peau, selon une étude de terrain effectuée, en 2017, par le Professeur Fatimata Ly, dermatologue, chef de service à l’Institut d’hygiène sociale, plus connu sous le nom de Polyclinique.

Malgré ce décompte macabre, les campagnes vantant les produits de dépigmentation continuent de passer sur nos écrans. Pourtant l’article 112 du code de la presse interdit formellement toute publicité de produits de dépigmentation. À côté des armes à feu, cartouches ou jouets de guerre, boissons alcoolisées, produits alimentaires non certifiés, tabacs et produits du tabac, l’articles 112 énonce que « des produits cosmétiques de dépigmentation » font partie des « messages publicitaires » « interdits » d’en faire la promotion dans les médias sénégalais.

Le cas Sen Tv en 2019

C’est ce qui avait conduit le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA) à agir, en novembre 2019. Une mise en demeure avait, d’abord, été envoyée à des médias. Sen Tv, Zik Fm et Tfm étaient enjoints de « mettre un terme définitif à la publicité de produits de dépigmentation ». Puis le couperet est finalement tombé, fin 2019 : « la diffusion des programmes de la Sen Tv est suspendue pour sept jours, durant la période allant du 31 décembre 2019 à minuit au 7 janvier 2019 à minuit ». Le gendarme de l’audiovisuel sénégalais motive, alors, sa décision par les manquements à la loi n°2017-27 du 13 juillet 2017 portant code de la presse qui prévoit l’interdiction de la publicité des produits cosmétiques de dépigmentation.

Cette décision fut largement commentée puisqu’elle était assimilée à des représailles contre Sen Tv qui avait invité l’opposant Ousmane Sonko à une grande interview le soir même du discours du 31 décembre du président Macky Sall. « Pourtant, calcul ou pas calcul, la mesure entrait en vigueur, seulement, à partir de 00h00, soit quelque deux heures d’horloge après le début de l’interview qui n’aurait quand même pas pu couvrir cet écart », ironise Ibrahima Bakhoum, chargé de la communication du CNRA, pour évacuer les accusations de « commande politique du palais ».

Nonobstant ces prérequis, les annonces sur les produits de dépigmentation ont fait leur retour sur certaines télévisions sénégalaises. Avec un changement de vocable, ça passe. La notion de « Produits cosmétiques de dépigmentation » laisse la place à « produits cosmétiques » ou tout bonnement « produits éclaircissants ». « La nuance est mince entre produits dépigmentants et produits cosmétiques éclaircissants », souffle Ibrahima Bakhoum.

Pourtant le code de la presse sénégalaise dit clairement que « la publicité dissimulée est interdite », en son article 106. « Le Xessal, c’est surtout le détournement d’un médicament de son usage médical », informe Rosalie Sarr Faye de l’Aiida. Le code de presse poursuit : la publicité « ne doit pas être trompeuse ou porter atteinte à la santé du public » (l’article 109). Avec une dizaine de morts en quatre mois, la notion de « santé du public » devient une évidence.

Vide numérique

Malgré ses dispositions, le code de la presse précise également que « la législation nationale sur la publicité est applicable aux entreprises de communication audiovisuelle ». Sauf que la dernière législation nationale sur la publicité au Sénégal date de… 1983. Plus de quarante années. Âge que certaines victimes n’ont malheureusement jamais. La gestion des contenus sur Internet est également une préoccupation.

Pour le moment, il y a un vide dans la législation sénégalaise. En France, par exemple, il y’avait le CSA (l’équivalent de notre CNRA) pour l’audiovisuel, et la Hadopi pour légiférer à propos d’internet. Ces deux entités ont été fusionnée, le 1er janvier 2022 pour donner l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom).

La publicité des produits de dépigmentation n’a pas horreur du vide.

Sur nos différents supports tv et écrans de téléphones ou tablettes, on continue d’annoncer l’apocalypse. La pression marketing a un impact absolu dans nos vies. Alors que tout est à faire en matière de santé publique, la question du Xessal n’est plus individuelle. Certes, il faut un environnement favorable sans rendre responsable l’individu. Mais doit-on continuer à laisser faire ?

On sait que le Xessal implique un problème de santé publique. Ce n’est plus d’ordre individuel, mais il faut un environnement favorable sans rendre responsables les individus. Mais doit-on laisser faire ? Le Royaume-Uni montre la voie. Jeudi 12 septembre, l’interdiction de la publicité pour la malbouffe sur Internet et à la télévision en journée est confirmée par le gouvernement de Keir Starmer. La mesure entrera en vigueur le 1er octobre 2025. Concrètement, le gouvernement britannique prévoit, donc, d’interdire la publicité pour des aliments trop gras, trop sucrés ou trop salés avant 21H00 à la télévision et totalement en ligne. Ce sont des décisions inspirantes.

MD

Redaction: Dakmedina.com

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