16 November 2025
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La société qui célèbre l’échec né d’un immobilisme

  • mai 31, 2025
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En relisant un beau texte de Tidiane ibn Sidy, j’ai réchauffé un autre écrit le 06 avril 2025, portant sur une course d’ânes et la suite qu’elle a

La société qui célèbre l’échec né d’un immobilisme

En relisant un beau texte de Tidiane ibn Sidy, j’ai réchauffé un autre écrit le 06 avril 2025, portant sur une course d’ânes et la suite qu’elle a eue du fait d’un fait divers.

Le rideau s’est ouvert le jour où ce pays célèbre son indépendance avec une équipe qui s’est bâtie autour de la souveraineté et comme credo de gouvernance : DROITURE, JUSTESSE ET REDRESSEMENT.

Le théâtre est un amusement aux allures d’effarement : une course d’ânes comme cela s’organise presque partout, ce même jour, dans le pays.

Avant, je signale que je nai rien contre le jeune Ameth. Je le trouve charmant, innoncent et touchant comme garçon. Mais, je pointe du doigt, les impairs de notre société.

C’était l’histoire d’un jeune garçon, usurpateur de patronyme d’ailleurs, donc un tricheur, sous le charme de carnavale et du rythme des tambours. Ameth Ndiaye, ayant chipé un dossard et sentant sa requête de participation rejetée pour tardiveté (il est arrivé en retard comme c’est la règle dans son pays), s’est faussement présenté sous ce nom qui deviendra le plus prononcé de ce mois du poisson rouge.

A la ligne de départ de la course des vaillants ânes, l’animal du faux Ameth, digne et têtu, s’arrêta, comme pour ne pas participer à la forfaiture du jeune et naïf jockey. Il resta figé, impassible, regardant les autres s’élancer alors qu’il était bien nourri et mieux nourri que tous les autres de l’écurie de notre cher Ameth.

Un smartphonophile, adepte de la communauté 2.0, filmait un âne immobile, un enfant qui ne cède pas et une foule perplexe, sous le micro ironisant d’un reporter. Une phrase sortant de la bouche du petit enfant, désœuvré et bégayant, devient, par un simple post, le mot en vogue : il refuse d’avancer. « Daa bagna dem »

Il faut croire que les jurons de Yéyé dans Zembla trouveraient un digne écho sous nos baobabs et koras connectés.

Oui, au Djolof, un âne qui refuse juste de courir, un enfant qui braille parce que ne comprenant pas, un amateur qui filme comme s’il assistait à une onction impériale… et l’épopée nationale est lancée.

Le lendemain, l’histoire est au zenith : le monde entier l’avait vu. Le néant devint viral juste pour chanter, célébrer et magnifier un échec, un refus, un recalé.

Ainsi, l’absurde fait récit, l’échec devient médaille et l’insignifiant s’élève au rang de politique de reconnaissance.

Et puis l’apothéose, nous apprend Tidiane ibn Sidy :

  • Smartphones offerts,
  • Terrain offert,
  • Passage télé,
    -invité d’honneur dans des cérémonies sociales et activités scolaires,
  • Pèlerinage viral.
    Tout cela… pour une immobilité obstinée.

Curieusement et c’est l’épée en plein coeur, le véritable gagnant de la course d’ânes, lui : oublié, zappé et tristement inconnu. Voilà un champion totalement perdu dans les brumes comme c’est de coutume ici.
Aucun papier. Aucun micro. Aucune image. Aucun like. Aucun commentaire. Même pas une gourde de thé ou une visite populaire ou officielle. Gagnant, il est rentré presque seul.

Ce 04 avril, le pays a réussi l’impensable : ériger l’échec en tremplin social et la triche en quitus participatif. Ce forfait connu, aucune sanction. On en rigole, on circule. Y a rien à voir.

Lorsque que l’image d’un âne campé émeut les réseaux sociaux et que son petit maître devient l’idole d’un peuple en mal de distractions, c’est le pays qui s’enfonce doucement, sans fracas.

Oui ! Lorsqu’on offre des cadeaux à un perdant pour l’ériger en héros, c’est la société qui révèle son profond malaise et sa descente insoupçonnée dans les abysses de l’immoralité.

Nous vivons le silence d’autel et validons les primes offertes à l’inaction. Cette posture immobiliste de l’interne, influe mécaniquement et naturellement sur la scène internationale. Les candidats à beaucoup de postes stratégiques ont été recalés, ajournés aujourd’hui à la BAD, hier ignorés à la CAF et boudés par la FIFA. La grande nation, géant diplomate, ne serait-elle pas devenue un colosse aux pieds d’argile ?

Et pourtant… rien. Pas une tribune d’intellectuels. Pas un cri d’économiste.
« Dieu sait qu’autrefois, les chutes éveillaient les plumes, les poètes ranimaient l’orgueil, les anciens frappaient le sol de leur canne », nous dit Tidiane ibn Sidy. Aujourd’hui, ils partagent des vidéos d’ânes couronnés par leur immobilisme et leur diplôme de faux départ.

Quand tout est faux, le vrai se dissipe et l’échec triomphe.Ce n’est pas une affaire d’Etat. Ce n’est pas une question de régime : c’est la société qui est malade.

Prof. Mounirou SY

Texte inspiré par Tidiane ibn Sidy

Rédaction: Dakmedina.com

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