Le remaniement ministériel du 6 septembre 2025 dépasse le simple réajustement technique. Il envoie un signal politique fort : le président Bassirou Diomaye Faye a fini par céder aux exigences de son Premier ministre, Ousmane Sonko, en lui ouvrant les portes des ministères stratégiques.

Un triomphe apparent pour Sonko, mais un triomphe qui pourrait se transformer en piège.

Les départs qui parlent

Ousmane Diagne, ministre de la Justice, est le premier grand sacrifié. Magistrat respecté, il avait affirmé que « les juges du siège ne reçoivent d’ordre de personne ». Une position républicaine, mais incompatible avec la vision de Sonko, qui entend faire de la Justice un levier de rupture.

Le général Jean-Baptiste Tine, à l’Intérieur, quitte également le gouvernement. Symbole de neutralité et de continuité institutionnelle, il cède sa place à un profil plus engagé politiquement. Ces deux limogeages ne sont pas anodins : ils traduisent la fin d’un fragile équilibre.

Les hommes de Sonko aux postes-clés

Le casting est clair : Sonko verrouille désormais trois ministères déterminants.

• À la Justice, Yassine Fall, proche du Pastef, prend le contrôle du ministère qui fut le théâtre des confrontations judiciaires de Sonko.
• À l’Intérieur, Me Bamba Cissé, avocat et ancien coordinateur de son pool de défense, hérite d’un portefeuille sensible : police, administration territoriale, élections.
• Aux Infrastructures, Déthié Fall, fidèle allié, contrôle les chantiers routiers, autoroutiers et de désenclavement. Un ministère stratégique pour juger de la crédibilité de la relance économique.

Ces trois ministères, parmi les plus stratégiques du pouvoir, sont désormais confiés à ses hommes de confiance. Ils constituent de véritables leviers et offrent à Sonko un espace inédit pour imposer sa politique.

Les avantages : des coudées franches

Avec ce remaniement, Sonko dispose enfin de relais sûrs. La Justice et l’Intérieur lui permettent de sécuriser l’appareil d’État, tandis que les Infrastructures offrent des résultats visibles et mobilisateurs. Il a désormais les moyens de prouver que sa vision de gouvernance n’est pas qu’un discours.

En concentrant ses fidèles à des postes stratégiques, Sonko met fin à l’ambiguïté des premiers mois du tandem Diomaye–Sonko, où certains ministres semblaient évoluer en électron libre.

Les risques : plus d’excuses possibles

Mais le cadeau a un prix. Diomaye Faye retire à Sonko ses marges de manœuvre rhétoriques. Fini le temps des critiques et des obstacles institutionnels invoqués pour justifier l’attentisme.

Si Sonko réussit, il sortira auréolé d’une victoire politique. S’il échoue, chaque erreur portera sa signature. Les électeurs, les partenaires internationaux et ses alliés jugeront sa capacité à transformer la contestation en gouvernance efficace.

Entre victoire et piège

Ce remaniement est à double tranchant. Victoire éclatante, car Sonko tient désormais des leviers stratégiques. Piège subtil, car il se retrouve seul responsable des résultats.

Le Sénégal traverse une crise sociale et économique étouffante. La concentration du pouvoir entre les mains d’un cercle restreint peut rassurer les partisans de Sonko, mais inquiéter ceux qui espéraient une ouverture politique.

Alors, cadeau empoisonné de Diomaye ou coudées franches pour Sonko ? La réponse dépendra moins des équilibres politiques que de la capacité du Premier ministre à produire des résultats tangibles. Une chose est certaine : septembre 2025 marque la fin du temps des critiques et le début du temps des responsabilités.

Par: Colylamine
Redaction: Dakmedina.com