23 October 2025
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DETTE CACHÉE, VÉRITÉ MAQUILLÉE : CHRONIQUE D’UN PAYS EN FANFARONNADE

  • octobre 17, 2025
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La dette cachée a beau être confirmée, elle n’a pas fini de diviser. Entre le FMI qui félicite, Sonko qui s’en réjouit et Macky qui se défend, le

DETTE CACHÉE, VÉRITÉ MAQUILLÉE : CHRONIQUE D’UN PAYS EN FANFARONNADE

La dette cachée a beau être confirmée, elle n’a pas fini de diviser. Entre le FMI qui félicite, Sonko qui s’en réjouit et Macky qui se défend, le Sénégal s’offre une nouvelle querelle de prestige. Ici, chaque chiffre devient arme, chaque mot devient stratégie, et la vérité, comme souvent, reste en sursis. Depuis que Kristalina Georgieva, la patronne du FMI, a lâché sa petite bombe diplomatique :

« Oui, une dette était cachée, et les autorités sénégalaises ont eu le courage de la révéler »,
le pays tout entier est entré dans une nouvelle transe collective : celle du grand procès de la dette. Une phrase courte, nette, mais explosive. Assez pour que les uns crient à la réhabilitation morale du régime Sonko-Diomaye, et que les autres hurlent à la manipulation d’État. Bref, au Sénégal, même quand le FMI parle économie, nous, on entend politique.

Pour Ousmane Sonko et son gouvernement, cette phrase vaut plus qu’un rapport budgétaire : c’est un certificat de vertu, tamponné et signé par la plus haute institution financière du monde. Lui qui, depuis ses débuts, dénonçait les “coulisses opaques du Mackyland”, se voit soudain adoubé par Kristalina en personne, un peu comme si l’arbitre venait de siffler penalty après trois ans d’attente au VAR. Dans les rangs du pouvoir, c’est la liesse. On parle de courage, transparence, vérité restaurée. Et le FMI, jusque-là perçu comme le diable des politiques d’austérité, redevient miraculeusement un partenaire éclairé dès qu’il parle dans le bon sens. Comme quoi, la morale économique dépend parfois… de la direction du vent politique.

À la permanence de l’APR, l’ambiance est tout autre. Le parti de l’ancien président Macky Sall dénonce une « manipulation grossière » et une « contre-vérité d’État », affirmant que tout cela relève d’une stratégie politique bien huilée. Et d’ailleurs, rappellent-ils :

Tous les comptes de l’État ont été certifiés par la Cour des Comptes entre 2012 et 2023 .”

Traduction : si dette il y a, elle n’est pas cachée ,elle est bien connue, bien comptée, bien classée, et même bien encadrée par décret. Mais surtout, Macky et les siens posent la question qui tue : « Comment cacher une dette à des créanciers qui connaissent les montants au centime près ? »

Un argument rationnel, certes, mais qui peine à couvrir le bruit politique de la tempête. Et pendant que le camp de l’ancien président réclame la publication des rapports de l’Inspection Générale des Finances, de la Cour des Comptes, du cabinet Forvis-Mazars et du Bulletin de la dette nationale, la polémique continue d’enfler, comme un prêt à taux variable.

Au fond, cette affaire n’a plus rien d’économique : elle est devenue morale, symbolique et profondément politique. La dette publique s’est transformée en métaphore nationale : un pays qui peine à solder ses comptes avec lui-même. Chacun brandit son chiffre, son rapport, sa vérité. Et pendant ce temps, la dette ,qu’elle soit cachée, gonflée ou fantasmée , continue de peser sur les épaules d’un peuple fatigué de payer pour les erreurs des puissants. Cette querelle révèle surtout un Sénégal en quête de cohérence, celui où la transparence dépend de qui détient le micro, où l’on réclame des audits quand on n’est plus aux affaires, et où l’on découvre subitement les vertus du FMI quand il sert nos intérêts. La dette cachée est peut-être réelle, peut-être pas. Mais ce qui ne fait aucun doute, c’est que la dette morale, elle, est bien là : dette de vérité, dette de confiance, dette de parole. Et celle-là, aucun audit, aucun communiqué, aucun rapport ne viendra l’effacer.

La dette cachée, au bout du compte, n’est peut-être qu’un symbole de plus dans notre théâtre politique : une pièce où chacun joue son rôle entre indignation et justification. Le FMI a parlé, les camps se déchirent, et le peuple observe, incrédule, mais pas dupe. Car au Sénégal, la vérité n’est jamais gratuite. Et dans un pays où l’on doit déjà tout rembourser, c’est encore la dette de lucidité qu’il nous reste à payer.

Au Sénégal, certaines dettes se remboursent avec des chiffres, d’autres… avec la conscience.

Par: Colylamine
Redaction: Dakmedina.com

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